Tiers lieu culturel?

Ceci est l’histoire d’une bonne idée et de la manière dont la politique culturelle d’Esch l’a sabotée. Ce site documente le développement de la scandaleuse ASBL “frEsch”, l’échec de la stratégie culturelle “Connexions” de la commune d’Esch, les intrigues autour de la capitale européenne de la culture Esch2022, et le naufrage du tiers-lieu Bâtiment 4.

Qu’est-ce que le Bâtiment 4 ?

D’après les descriptions de la commune d’Esch, d’Esch2022, de frEsch et même du gouvernement, le Bâtiment 4 – l’ancien bâtiment administratif de la friche Esch-Schifflange – serait un “tiers-lieu culturel et citoyen”. Un espace de plus de 3.000 m², géré par un collectif indépendant de résident·e·s, censé être un lieu de liberté, d’expérimentation et d’innovation sociale et écologique. Ça, c’est pour la théorie.

Qu’est-ce que frEsch ?

frEsch est une ASBL créée par la commune d’Esch pour mettre en œuvre sa propre stratégie culturelle. L’association compte actuellement environ 24 employé·e·s et un conseil d’administration présidé par Pim Knaff, l’échevin de la culture d’Esch. frEsch serait censée transformer Esch en un pôle de créativité, de diversité, d’innovation et de création. Ça, c’est pour la théorie.

Timeline

2016-2017

Esch mise sur la culture

“Nous n’allons pas simplement construire un nouveau théâtre, inviter des groupes de musique coûteux ou encore ériger des pavillons qui seront démolis après deux ans.” (Forum, 2016)

Avec ces mots, la bourgmestre de l’époque, Vera Spautz, présente le projet de la Ville d’Esch de poser sa candidature pour devenir capitale européenne de la culture en 2022.

Pour répondre aux conditions imposées par la Commission européenne, une stratégie culturelle est adoptée en juin 2017. Le “Plan [Connexions]” est approuvé par tous les partis du conseil communal. Une intention claire est définie :

« Faire d’Esch-sur-Alzette un centre culturel créatif reconnu (dans la Ville, la région, le pays et la Grande Région) pour la diversité de sa culture et sa capacité d’innovation et de création. » (Plan Connexions, 2018)

À ce stade, il n’est pas encore question du Bâtiment 4. Cependant, l’idée d’un espace ouvert à la création, quelque part sur le site de l’ancienne friche industrielle d’Esch-Schifflange, commence à circuler.

Bidbook Esch2022 : Une première tentative échoue

Dossier de Candidature Esch2022. Source : capture d’écran du 24.02.2025, esch2022.lu

Le premier Bidbook, avec lequel Esch se présente à la Commission européenne pour devenir capitale européenne de la culture, est dévoilé en avril 2016. Pour élaborer ce concept, le chef du service culturel d’Esch, Ralph Waltmans, s’entoure du consultant culturel Emmanuel Vinchon, qui rédige ce premier dossier sous le titre “All we need is love”. Ayant déjà travaillé pour Lille2004 et Mons2015, Vinchon est convaincu que rien ne peut mal tourner à Esch.

Le retour de la Commission européenne est catastrophique. Le projet eschois est critiqué comme étant superficiel, générique, inabouti et non durable. La seule raison pour laquelle Esch passe au tour suivant est qu’aucune autre ville luxembourgeoise ne s’est portée candidate. Le jury mentionne même explicitement dans son rapport qu’un simple copier-coller de Lille2004 et Mons2015 ne suffira pas (p.17).

Face à ces critiques, une refonte du projet s’impose à Esch. Exit Emmanuel Vinchon et Ralph Waltmans : une nouvelle équipe composée de Janina Strötgen et Andreas Wagner travaille désormais sur un nouveau concept. Avec le Bidbook “Remix”, l’accent est désormais mis sur la mixité sociale et culturelle d’Esch, en s’appuyant sur la nouvelle stratégie culturelle de la ville.

Le Plan Connexions : La création comme priorité

Stratégie culturelle - Esch Citylife. Source : capture d’écran du 24.02.2025, esch.lu

C’était une exigence de la Commission européenne : Esch devait se doter d’une véritable stratégie culturelle, capable d’orienter la politique culturelle de la ville de manière durable et à long terme. Jusque-là, Esch suivait de manière approximative les objectifs de l’ONU en matière de politique culturelle et faisait partie du réseau “Agenda 21 for Culture”. Désormais, une stratégie solide est élaborée en collaboration avec divers experts et institutions culturelles d’Esch, et l’ensemble des partis politiques l’approuvent.

C’est ainsi que naît le Plan Connexions, le premier plan de développement culturel au Luxembourg. Cinq priorités sont définies, accompagnées de pistes concrètes pour les mettre en œuvre :

  1. Soutenir la création dans la Ville
  2. Favoriser la diversité culturelle et l’accès de tous à la culture
  3. Faciliter la possibilité pour tous de se former par la culture et aux cultures
  4. Soutenir le développement économique par la culture
  5. Valoriser l’image d’Esch à l’extérieur et aux yeux des Eschois

Parmi les actions concrètes évoquées, plusieurs initiatives font écho à l’idée d’un tiers-lieu. On y trouve par exemple :

  • “Mettre en place des Maisons de quartier pour les associations”,
  • “Création de lieux pour favoriser la création : résidences d’artistes, pôle créatif (à l’image de Luxinnovation), fab lab, cluster et / ou d’un hub, à moyen/long terme” (p.59).

Premières réflexions sur le Bâtiment 4

La friche Esch/Schifflange 1995, photo : Sludge G/Flickr

Les idées autour de l’activation du site industriel Esch-Schifflange circulent depuis un certain temps. Le premier Bidbook reste très vague et évoque simplement la possibilité de créer un “space for exchanges in a context of artistic creation” sur le site de la friche Esch-Schifflange (p.54-55).

Les intentions derrière ce projet ne sont pas cachées. Michel Wurth, président d’Arcelor-Mittal Luxembourg, propriétaire du site et des bâtiments, est cité dans le Bidbook. Arcelor-Mittal souhaite utiliser la culture pour dynamiser l’espace et en faire un lieu attractif en vue des futurs projets résidentiels qui y seront développés.

Avec la nouvelle équipe d’Esch2022, les plans deviennent plus concrets. Les coordinateurs de l’époque, Andreas Wagner et Janina Strötgen, présentent en février 2017 leur idée d’un “Remix Center” :

“Nous voulons en faire un lieu concret où chacun pourra proposer ses idées de projets […] WOXX : Où pourrait se situer ce lieu ? Janina Strötgen: Nous pensons par exemple aux bâtiments administratifs de l’ancienne Université d’Arbed, en direction d’Esch-Schifflange. Il faudrait bien sûr clarifier si et comment ces bâtiments sont accessibles et disponibles.” (WOXX, 2017)

2017

Changement politique et putsch culturel

Le 8 octobre 2017 ont lieu les élections communales. Une coalition entre le CSV, le DP et les Verts envoie le LSAP dans l’opposition. Georges Mischo devient bourgmestre et la tête de liste du DP, Pim Knaff, est nommé échevin de la culture. Lorsque, le 10 novembre 2017, la candidature d’Esch au titre de capitale européenne de la culture est officiellement acceptée, la nouvelle coalition est déjà en place.
L’accord de coalition en matière de culture est extrêmement vague – et sera systématiquement ignoré.

Sous l’impulsion de Xavier Bettel et de son secrétaire d’État à la culture, Guy Arendt, un putsch est organisé à la tête d’Esch2022 : le personnel autour de Janina Strötgen et Andreas Wagner (Tageblatt, 2018) est remplacé par une “clique de la capitale”, comme est surnommée l’équipe rassemblée autour de la politicienne DP Nancy Braun et Christian Mosar. Officiellement, toutes les personnes impliquées continuent à soutenir l’idée de base du Bidbook, mais en coulisses, 90% du projet est abandonné (Land, 2020). L’objectif n’est plus la diversité, mais la promotion d’Esch en tant que pôle technologique.

Dans le même temps, les communes du Sud voient une opportunité de reprendre leur souveraineté et de récupérer leur budget auprès d’Esch2022. Elles obtiennent ainsi plus de contrôle sur les projets qui seront réalisés sur leur territoire dans le cadre de la capitale européenne de la culture. Esch2022 est affaiblie.

Pim Knaff au pouvoir

Nouveau responsable de la culture à Esch : Pim Knaff

L’élection de 2017 n’est que le point de départ de la carrière politique de Pim Knaff. Cet avocat très occupé et secrétaire du club de football Fola Esch, qui traîne une réputation douteuse dans la ville, a de plus grandes ambitions (Wort, 2017). En 2019, il est candidat du DP aux élections européennes, en 2020, il entre à la Chambre des députés et renforce son pouvoir au sein du parti.

Lorsque le DP décide de s’en prendre à l’équipe d’Esch2022 après les élections, Pim Knaff est en première ligne (Land, 2018). Ses compétences en politique culturelle restent inconnues. Officiellement, il soutient la stratégie culturelle d’Esch définie dans le Plan Connexions, mais en coulisses, il se laisse rapidement séduire par les événements élitistes de la haute culture.

Bridderhaus : la "cabane de jardin" de Martin Kox

Martin Kox devant le Bridderhaus, 2021. Source : esch.lu

Seul parti à rester au pouvoir après les élections de 2017, les Verts conservent un poste d’échevin. Martin Kox devient responsable des bâtiments et du logement et peut enfin concrétiser un projet qui l’avait opposé publiquement à son ancienne partenaire de coalition, le LSAP : la rénovation de la “Bridderhaus”, un bâtiment inoccupé depuis un certain temps.

La capitale européenne de la culture tombe à pic comme justification : un projet artistique doit y voir le jour, mais les détails restent flous lorsque Martin Kox le présente avec enthousiasme en 2018 au Wort (Wort, 2018). Ce qui semble le plus important, c’est que le parking disparaisse pour agrandir le parc. Un parc qui, et cela n’est pas mentionné dans l’article du Wort, se trouve par hasard juste à côté de la résidence de Martin Kox, et constitue son itinéraire favori pour se promener.

Le projet Bridderhaus est un scandale en soi. Le concept change plusieurs fois, et le nombre de chambres prévues pour la résidence d’artistes est progressivement réduit : initialement 17 (Tageblatt, 2019), puis finalement 8 (Bridderhaus, 2025), dont seules quelques-unes sont réellement utilisées. En 2023, seules 2 chambres étaient occupées, et aujourd’hui, il n’y en a toujours que 2.

Le fait qu’il n’y ait qu’une seule cuisine commune et qu’il faille changer d’étage pour accéder aux douches illustre l’inefficacité du concept. Pourtant, plus de 10 millions d’euros sont dépensés pour cette rénovation absurde. Des tabourets coûtant plus de 600€ pièce (Girsberger) sont achetés, et au lieu de vrais lits, des canapés à plus de 2.500€ l’unité (Likoolis) sont installés.

À l’extérieur, des pavés épais empêchent l’accès aux personnes âgées en déambulateur depuis la maison de retraite voisine, et à l’intérieur, les espaces de travail sont rapidement transformés en salles d’exposition.

La Bridderhaus ne sera pas prête à temps pour le début de la capitale européenne de la culture. Le bâtiment principal reste un chantier jusqu’à l’automne 2022, et le bâtiment annexe n’est terminé qu’en 2024. Pendant cette période, le bâtiment est principalement utilisé par le personnel administratif de frEsch.

Georges Mischo rêve d'un concert de Bruce Springsteen

Le maire Georges Mischo a une vision

S’il pouvait exaucer un vœu, ce serait de voir Bruce Springsteen se produire devant les hauts fourneaux, déclare Georges Mischo, bourgmestre d’Esch, sans la moindre ironie, dans une vidéo sur la chaîne YouTube d’Esch2022 en mars 2019. Le souci d’ancrage local et de diversité sociale du Bidbook “Remix” a déjà complètement disparu.

En tant que président du conseil d’administration d’Esch2022, Georges Mischo participe activement à la transformation de la capitale européenne de la culture en une campagne de marketing.

Alors que les responsables d’Esch2022, et ce n’est malheureusement pas une blague, cherchent un moyen d’attirer Banksy à Esch, le “bourgmestre de la fête foraine” (comme il est parfois surnommé) pense surtout à faire en sorte que la fête batte son plein.

2018

L'arrivée des conseillers

Dans une interview, le coordinateur du service culturel d’Esch, Ralph Waltmans, précise dès février 2016 pourquoi l’année culturelle sera une réussite :

“Zudem arbeiten wir auch mit dem gleichen Expertenteam, das Mons und Lille bei der Konzeption und Planung unterstützt hat” (Forum, 2016). Il fait ici référence à l’équipe autour d’Emmanuel Vinchon. Ce conseiller culturel a rédigé le premier bid book pour Esch, mais celui-ci a été rejeté. Ce ne fut cependant pas la fin de la carrière d’Emmanuel Vinchon et de son équipe à Esch, mais plutôt le début.

Sous le nouvel échevin de la culture Pim Knaff, Emmanuel Vinchon se voit confier en 2018 la direction de la “Nuit de la Culture” à Esch (Le Quotidien, 2018) et transforme l’événement en un méga-événement. Le conseiller Emmanuel Vinchon et son équipe de “Masters of Buzzwords”, l’ambitieux échevin de la culture Pim Knaff, ainsi que le coordinateur du service culturel d’Esch Ralph Waltmans (qui se réinvente et adopte désormais le titre de “directeur”) partagent une vision commune de la culture : des événements aussi prestigieux que possible dans l’espace public, avec des effets “waouh” uniques, réalisés par des professionnels venus de l’étranger, afin de redorer l’image de la ville.

Le succès et la durabilité d’Esch2022 (Reporter, 2018), ainsi que le plan Connexions, ne jouent plus qu’un rôle rhétorique vis-à-vis de la presse.

Emmanuel Vinchon : Mastermind ou Master of Bullshit ?

Emmanuel Vinchon façonne la scène culturelle eschoise

Emmanuel Vinchon sait vendre son cabinet de conseil “Écoute le paysage !”. Il prétend avoir mené les capitales européennes de la culture Lille 2004 et Mons 2015 vers le succès et ambitionne désormais de faire d’Esch un haut lieu culturel. “Une année culturelle est un levier magnifique pour le développement d’une ville”, déclarait Emmanuel Vinchon en 2016 dans une interview au Wort, juste avant que la Commission européenne ne reproche à son concept pour Esch2022 d’être un simple copier-coller de Lille et Mons.

Dans la thèse de doctorat “Événementialisation des politiques culturelles locales et politisation de la culture” de Damien Dusseaux, qui dresse le bilan de Lille 2004, Emmanuel Vinchon est décrit comme “un consultant spécialisé dans la vente de savoir-faire aux capitales européennes de la culture et aux collectivités territoriales” (p.228), dont le modèle économique repose sur la “circulation des professionnels entre les différents événements” (p.224). Dans une interview avec Mediapart, Emmanuel Vinchon parle d’un “tourisme de professionnels de la culture”. Et il en est lui-même un parfait exemple. À peine arrivé à Esch, il présente dès 2017 ses “recettes miracles” pour les candidatures à la capitale européenne de la culture dans la ville belge de Namur (Projet Urbain, 2017) et en 2019 à Rouen en France (Métropole Rouen Normandie).

Emmanuel Vinchon est très occupé. En plus de son poste à Esch et de ses nombreuses missions de conseil, il donne aussi des cours universitaires à Dunkerque, notamment sur la meilleure façon de traiter avec les élu·e·s locaux·ales. Ou, comme il le dit lui-même, il parle de “la force des propositions et de la commande décalée” (ULCO, 2020). Bien sûr, Emmanuel Vinchon n’a pas le temps de s’intéresser aux spécificités d’Esch. Mais avec des élu·e·s locaux·ales débordé·e·s et peu expérimenté·e·s en politique culturelle, il a la tâche facile. Emmanuel Vinchon ne propose pas seulement toujours les mêmes recettes, mais il applique aussi partout le même programme culturel, souvent avec les mêmes compagnies et entreprises. Son programme n’est donc ni local, ni régional, ni durable.

L'apprenti Loïc Clairet

On peut faire confiance à Loïc Clairet

En 2019, Loïc Clairet reprend la direction de la Nuit de la Culture à Esch après Emmanuel Vinchon. Tous deux se connaissent de Mons 2015 et sont associés dans le cabinet de conseil “Écoute le Paysage”. Ils ne travaillent cependant pas toujours ensemble, ce qui pose parfois des problèmes de conflits d’intérêts. Par exemple, Loïc Clairet conseille la ville de Reims pour sa candidature à la capitale culturelle française 2028, tandis qu’Emmanuel Vinchon conseille Rouen. Les deux candidatures échouent.

Loïc Clairet suit-il les traces d’Emmanuel Vinchon ? Tout comme son mentor, Loïc Clairet enseigne aussi à l’université de Dunkerque en parallèle de ses activités de conseiller culturel. Cela prend bien sûr du temps, et son équipe à Esch sait que Loïc Clairet, directeur des Francofolies et de la Nuit de la Culture, est rarement présent les vendredis et lundis. Comment parvient-il à gérer toutes ses responsabilités ? Tout simplement en recrutant, avec l’argent de la commune d’Esch, une série d’anciens collègues pour le soutenir et en engageant des sociétés de production qui font le travail à sa place.

La Nuit de la Culture devient un événement importé

Affiche de la Nuit de la Culture 2018. Source : Kufa/Facebook, 03.05.2018

Dans une interview avec Radio 100,7, Ralph Waltmans explique en 2015 l’histoire et le concept de la Nuit de la Culture à Esch. Cet événement était à l’origine une sorte de portes ouvertes pour toutes les institutions culturelles locales, en collaboration avec les associations et commerçants. Il s’agissait donc d’un événement profondément ancré dans la scène culturelle locale. Cela change en 2018 avec l’arrivée d’Emmanuel Vinchon.
À partir de 2018, la Nuit de la Culture d’Esch n’a plus grand-chose à voir avec les institutions culturelles locales. Elle devient un festival de rue composé de spectacles réalisés par des compagnies professionnelles extérieures. Les thèmes sont interchangeables : en 2018, c’est “Feu”, en 2019 “Eau”, et naturellement, les éditions suivantes portent les deux autres éléments (Wort, 2020). Les finances révèlent dans quelle mesure Emmanuel Vinchon a puisé dans son carnet d’adresses pour des événements similaires en France. Ce n’est ni local, ni durable, mais du moment que c’est spectaculaire, peu importe.

2018: Les Francofolies arrivent à Esch

Annonce des Francofolies 2018. Source : LesFrontaliers 2018

C’est probablement le changement direct le plus frappant dans la politique culturelle d’Esch : Un entrepreneur et un responsable du festival “Francofolies” de La Rochelle approchent la commune d’Esch et proposent d’organiser un festival à Esch. Vera Spautz avait pourtant promis de ne pas inviter de groupes mega chers, mais Pim Knaff mise clairement sur le contraire. L’été 2018 voit la présentation du line-up du festival “Warm Up” pour les Francofolies. À la presse, Pim Knaff déclare que le festival « va dans le même sens que le plan culturel de la ville et aura certainement des retombées touristiques et économiques » (Paperjam, 2018) - l’une des nombreuses déclarations (cf. Quotidien, 2018), qu’il ne peut pas prouver. Mais personne ne pose la question.

La première édition est un échec. Plusieurs artistes se retirent, il y a peu de public pour les concerts en plein air qui se tiennent sur des scènes surdimensionnées. Malgré tout, Pim Knaff annonce peu après la prochaine édition (Wort, 2019). Pour que cette fois cela fonctionne, une recette de succès est trouvée :
«s’entourer de professionnels», comme Loïc Clairet, le nouveau coordinateur général de l’évènement, mais également mettre la main à la poche. Pour preuve, les quelque 1,3 million débloqués par la commune pour ce lifting à tous les étages(Quotidien, 2019).

2019

Un "tiers-lieu culturel" pour Esch ? Allez, pourquoi pas.

Logiquement, l’impulsion décisive pour l’ouverture du Bâtiment 4 ne vient pas de la commune d’Esch, mais de l’Œuvre Nationale de Secours et d’Esch2022, qui lancent fin 2019 l’appel à projets “Tiers lieux culturels”. Le concept de “tiers lieu” décrit une notion concrète de collaboration locale et participative et n’est pas encore établi au Luxembourg.

L’échevin de la culture, Pim Knaff, se concentre principalement sur ses nouveaux “temples de la culture”. Mais avec le Bâtiment 4 en tant que tiers-lieu, il y voit l’opportunité d’ajouter un projet gratuit à la vitrine, qui, du moins en apparence, reflète les objectifs initiaux de la stratégie culturelle d’Esch. Le bâtiment lui est mis gratuitement à disposition par ArcelorMittal et, grâce à la création par la commune d’Esch en avril 2020 de l’A.S.B.L. “frEsch” (culture.lu, 2021), une subvention de 400.000€ de l’Œuvre est en vue.

Le Land a consigné les promesses de Pim Knaff à l’époque :

“Désormais, le bâtiment doit servir comme un soi-disant tiers-lieu culturel. Un espace libre, sans programme fixe, sans structure clairement définie et sans hiérarchie. Dans le Bâtiment IV, les personnes doivent se rencontrer plutôt par hasard et rechercher l’échange culturel. Selon l’échevin de la culture Knaff, les choses doivent se développer d’en bas, sans directives ni objectifs clairs” (Land, 2020).

Œuvre : Idées claires et conditions pour les tiers-lieux

Brochure “Journée Tiers-lieux culturels”, Œuvre Nationale 2019

Il existe de nombreux modèles sur la manière dont un “tiers lieu culturel” peut fonctionner – mais le concept n’est pas pour autant flou. L’Œuvre précise les critères ainsi que la vision qu’elle a pour les trois “tiers lieux” https://www.oeuvre.lu/nous-connaitre/missions/culture/tiers-lieux-culturels/ qu’elle entend financer. Une conférence en mars 2020 a offert des perspectives sur trois exemples issus de l’étranger.

Le calendrier de l’Œuvre prévoit que les résultats des appels à projets seront présentés en mai 2020, que les concepts devront être finalisés d’ici la fin 2020, et qu’un “fonctionnement à 100 % du projet” devra être atteint au plus tard début 2022.

Création de l'association frEsch A.s.b.l.

Pim Knaff pense déjà à l’après Esch2022

Le 23 mars 2020, l’“association frEsch A.s.b.l.” est fondée, et ses statuts sont déposés le 1er avril. Selon le discours de l’échevin de la culture Pim Knaff au conseil communal du 10 juillet 2020, la création d’une telle association était initialement prévue pour la période après Esch2022, mais elle a été anticipée. L’adresse correspond à celle du service culturel d’Esch, et le président en est l’échevin de la culture lui-même. Outre ce dernier, frEsch ne compte que quatre autres membres fondateurs, tous employés par la commune : le secrétaire général Jean-Paul Espen, le chef du service culturel Ralph Waltmans, l’agent du service de développement urbain Daisy Wagner, ainsi que l’employée du service culturel Céline Schall.

Selon les statuts, frEsch a pour mission essentielle de mener à bien le plan de développement culturel d’Esch intitulé “Connexions”.

2020

Investissement en pierre et béton

“Nous ne construirons pas de nouveaux temples de l’art”, déclarait Ralph Waltmans, chef du service culturel de la Ville d’Esch, en 2016 en vue d’Esch2022 (Wort, 2016). Mais plus la Capitale européenne de la culture approchait, plus ces déclarations s’effaçaient. Pim Knaff, l’échevin de la culture, annonçait fièrement la transformation du Bridderhaus, la rénovation du Musée de la Résistance, la construction d’un nouveau conservatoire, la rénovation de l’Ariston, l’ouverture d’un musée d’art dans l’ancien magasin de meubles Lavandier ainsi que le “tiers lieu” Bâtiment 4 (Wort, 2020). Et tout cela, indépendamment d’Esch2022.

Au sein de la lutte d’influence autour de la Capitale européenne de la culture, les communes du sud se concentrent sur leurs propres projets au lieu de contribuer à l’effort collectif. Esch2022, de son côté, met l’accent sur le parrainage privé (Land, 2021). En mai 2020, en plein désaccord interne, le directeur artistique Christian Mosar quitte Esch2022 (Wort, 2020) pour rejoindre frEsch, où il s’attèle au développement de la Konschthal et du Bridderhaus. Plusieurs journaux notent que frEsch représente, en quelque sorte, un projet concurrent d’Esch2022.

Le 10 juillet 2020, ARCELOR-Mittal remet symboliquement à frEsch les clés du Bâtiment 4 (esch.lu, 2020). Cependant, ce ne sera ni le Bâtiment 4, ni même le projet initial qui attireront l’attention, mais plutôt la Konschthal et le Bridderhaus, devenus subitement les projets centraux de frEsch. Petit à petit, le Bâtiment 4 passe à l’arrière-plan.

Le Bâtiment 4, un "projet de cœur" – même pour Arcelor-Mittal

Plans 3D du quartier Metzeschmelz. Source : capture d’écran, Agora.lu 2025

Dans une vidéo publiée peu après que frEsch a reçu les clés du bâtiment, le directeur du service culturel Ralph Waltmans présente le concept du Bâtiment 4. Il explique ainsi :

“Il n’y a personne pour décider d’en haut : ‘Nous allons maintenant monter une exposition […]’”, et “ce lieu est totalement ouvert, de 8 heures à 22 heures, le public peut venir ici.”

Le projet prévoit d’accueillir durablement les groupes HARIKO, ILL, CELL, le SNJ et CUEVA, ainsi que, potentiellement, le collectif noc.turn. En plus, le bâtiment serait ouvert aux artistes et aux créateurs. Au fil des années, le Bâtiment 4 revient régulièrement sur le devant de la scène – à travers des interviews, des études, des rapports ou des réunions du conseil communal, où les représentants de la majorité le qualifient de “projet de cœur”.

Cependant, pour les responsables de la politique culturelle d’Esch, ce “projet de cœur” leur est, en réalité, tombé dans les bras, principalement parce qu’Arcelor-Mittal a mis le bâtiment gratuitement à la disposition de frEsch. Le géant de l’acier, propriétaire du terrain Friche Esch-Schifflange sur lequel un nouveau quartier résidentiel doit voir le jour, ne cache pas ses intentions. L’objectif est d’activer cet espace :

“ArcelorMittal Luxembourg est fier de voir comment le Bâtiment 4 est mis à profit par un collectif d’artistes désireux d’offrir une expérience extraordinaire à ses visiteurs. […] Le Bâtiment 4 contribuera également à la stratégie de développement économique et touristique de la Ville d’Esch en revitalisant un quartier, en offrant aux résidents un nouvel espace de vie, à la fois familial et ouvert, en soutenant l’innovation et en promouvant le développement durable.” Arcelor-Mittal, 2020.

La convention entre frEsch et la Ville d’Esch intègre de nouveaux paragraphes montrant dans quelle mesure la Ville d’Esch répond aux attentes d’ARCELOR-Mittal : “Le Bâtiment 4 contribuera à la stratégie de développement économique et touristique de la Ville en redynamisant le quartier, en offrant un nouveau lieu de vie, familial et ouvert.” Les projets décrits par Arcelor-Mittal pour le Bâtiment 4 sont étonnamment ouverts et progressistes, en contraste marqué avec les activités habituelles du groupe sidérurgique. Le géant de l’acier écrit :

“[Le Bâtiment IV] se verra au cœur d’une innovation sociale avec le désir des artistes de créer un lieu d’expérimentation avec de nouvelles réponses aux défis sociétaux actuels : changements climatiques, défis écologiques, futures crises économiques, sociales, politiques ou sanitaires, replis identitaire… Symbole d’un « vivre différent », le Bâtiment IV sera le laboratoire d’une société plus ouverte et solidaire, concernée par toutes les cultures, l’ouverture à l’autre, le partage, de nouvelles formes de travail collectif, mais aussi et surtout la ré-économie, la permaculture, etc. Les associations, manquant habituellement de place, pourront s’exprimer et s’impliquer dans de nouveaux projets tout en se débarrassant des contraintes d’espaces auparavant éprouvées. Le Bâtiment IV sera donc un terrain d’expression et d’expérimentation pour l’ensemble des arts actuels et aussi l’ensemble des activités culturelles au sens large.”

Christian Mosar et sa Konschthal

Ce qui a finalement convaincu Christian Mosar d’accepter le poste reste flou

Pendant des mois, le conflit ouvert entre Christian Mosar et Nancy Braun a pesé sur Esch2022, à tel point que des plaintes avaient même été envisagées à un moment donné. Finalement, l’ancien critique culturel bénéficie d’un Golden Handshake : Pim Knaff nomme Christian Mosar directeur de la Konschthal et du Bridderhaus, un poste avec un salaire élevé pouvant être facilement proposé grâce à l’aide de frEsch (Culture.lu, 2021).

Christian Mosar devient ainsi la première personne employée par frEsch. Cependant, au moment de cette nomination, le seul projet de frEsch est le Bâtiment 4 et le seul budget disponible provient de l’Œuvre. Cette décision montre clairement que frEsch ne se concentre plus sur la mise en œuvre du Plan Connexions, mais sera utilisé par les responsables culturels à des fins variées : comment un musée d’art s’inscrit dans l’objectif du Plan Connexions reste flou. D’une manière presque délibérée, Christian Mosar et les autres responsables de la politique culturelle d’Esch transforment le projet Konschthal et Bridderhaus en une sorte d’antithèse à Esch2022. L’ouverture de la Konschthal a lieu avant celle d’Esch2022 et, pendant l’année culturelle, la Konschthal est en travaux pendant une longue période – de même que le Bridderhaus, qui est quasiment inutilisable durant la majeure partie de l’année Esch2022.

« Le bâtiment peut être utilisé tel quel avec peu de modifications », déclarait Georges Mischo lors de la présentation du budget pour 2021 au sujet de la Konschthal. Finalement, toutefois, 9,3 millions d’euros sont consacrés uniquement aux travaux de transformation, et 11,6 millions à l’achat du bâtiment, d’après les comptes du budget communal. Comme les fonds ne suffisaient toujours pas, Christian Mosar a même puisé dans le budget de frEsch pour financer, par exemple, l’éclairage LED de sa Konschthal, pour un montant de plus de 300 000 euros.

Les millions issus du budget communal

Chantier du Bridderhaus, 2021

Un examen des dépenses extraordinaires dans le budget communal d’Esch révèle l’engagement massif du conseil échevinal à investir dans ses temples culturels.

  • 2019 : 1,8 million d’euros pour les infrastructures culturelles existantes, point de départ de cet effort.
  • 2020 : 21,5 millions d’euros (dont 11,6 millions pour l’achat de l’Espace Lavendier, destiné à être transformé en Konschthal, et 4,7 millions pour l’Ariston).
  • 2021 : 15,2 millions d’euros (les postes les plus importants sont les rénovations de l’Ariston, du musée de la Résistance et du Bridderhaus).
  • 2022 : 24,6 millions d’euros (dont 7,9 millions pour l’achat d’un nouveau bâtiment pour le conservatoire, et les travaux de rénovation de l’Ariston, du musée de la Résistance et du Bridderhaus représentent le gros des investissements pour cette année).
    Les subventions allouées aux trois ASBL de la commune connaissent également une hausse notable :
  • 2019 : NdlC 660 000 €, FF 300 000 €, frEsch n’avait pas encore de budget.
  • 2020 : NdlC 660 000 €, FF 1 300 000 €, frEsch 400 000 €.
  • 2021 : NdlC 3 600 000 €, FF 2 300 000 €, frEsch 5 500 000 €.
  • 2022 : NdlC 2 500 000 €, FF 1 800 000 €, frEsch 2 700 000 €.
  • 2023 : NdlC 1 900 000 €, FF 1 600 000 €, frEsch 4 000 000 €.

Un tel investissement dans la culture mérite sans aucun doute des félicitations pour la commune d’Esch. Cependant, il apparaît que les investissements ne sont ni alignés avec le Plan Connexions, ni avec une autre stratégie culturelle concrète. Ils ne sont pas, pour la plupart, durables et il n’existe aucun contrôle détaillé sur l’utilisation des fonds. Les politiciens de l’opposition constatent pour la première fois qu’avec la structure des ASBL communales, ils perdent la visibilité sur les comptes. Malgré de bonnes intentions, le mode de financement culturel d’Esch s’approche de celui qu’on voulait éviter en premier lieu : des fonds consacrés aux infrastructures, au personnel administratif et à l’importation d’art venant de l’extérieur.

2021

Le Bâtiment 4 prend vie

Le 13 novembre 2020, l’exposition de CUEVA, une « initiative citoyenne » selon son responsable Théid Johanns, ouvre ses portes dans le Bâtiment 4 (CUEVA, 2020). Plus de 100 artistes se sont approprié les différents espaces pour des expositions et des installations, attirant un large public dans le bâtiment malgré la pandémie (Wort, 2020).

Après l’exposition CUEVA, un nouveau collectif se constitue : au départ, il s’agit de l’initiative HARIKO de la Croix-Rouge, qui trouve une résidence permanente dans le Bâtiment 4 après de nombreuses péripéties ; du collectif théâtral eschois Independent Little Lies avec ses divers projets ; et de F.u.t.u.r.e. de CELL, chargé par Esch2022 d’aménager une piazza participative et écoresponsable devant le Bâtiment 4. Le groupe Richtung22 rejoint ensuite cette équipe, et ensemble ils élaborent la structure de base pour organiser la gestion quotidienne et la cohabitation dans le bâtiment.

frEsch embauche directement auprès d’Arcelor un « facilitateur technique » pour superviser la mise en conformité du bâtiment. En mai 2021, un « facilitateur culturel » est ajouté pour assister le collectif du B4 dans toutes les tâches administratives et organisationnelles. Globalement, frEsch reste presque invisible dans le Bâtiment 4 jusqu’à fin 2022.

Les raisons du succès éphémère du Bâtiment 4 dans la création locale

De jeunes artistes participent à l’exposition QUEVA. frEsch fait repeindre le mur en gris allemand un an plus tard. Source : QUEVA/Facebook 2019

Le Bâtiment 4 est, en réalité, le seul grand projet à Esch qui correspond à un grand nombre d’objectifs du Plan Connexions. Que les responsables en soient conscients se reflète dans la manière dont le Bâtiment 4 est présenté dans leur communication. Le Bâtiment 4 est ainsi considéré comme une preuve lorsqu’il s’agit de participation ou de durabilité (par exemple Wort, 2020).

Un regard en coulisses du service culturel d’Esch explique comment cette initiative a vu le jour. Les plans Connexions 1 et 2, la candidature d’Esch à devenir un « tiers-lieu », ainsi qu’une série d’autres initiatives dans le domaine de la participation et de l’évaluation, proviennent tous du travail d’une collaboratrice compétente. Cette collaboratrice soutenait également le collectif du Bâtiment 4 à ses débuts, avant d’être de plus en plus marginalisée et critiquée en interne par le directeur du service culturel d’Esch – jusqu’à être finalement écartée.

Un autre pilier du succès du Bâtiment 4 à ses débuts est qu’Esch2022 a soutenu financièrement un grand nombre de projets locaux via un « Open Call ». Cet « Open Call » était en réalité une solution d’urgence d’Esch2022 pour intégrer un maximum de projets dans le programme à la dernière minute. Si cette procédure comportait de nombreuses failles et que les résultats se faisaient attendre à tel point que certaines grandes institutions, comme la KUFA, ont renoncé à certains projets (Tageblatt, 2020), les projets restants étaient principalement portés par de petits collectifs indépendants et des artistes individuels.

Pour réaliser leurs projets, de nombreux groupes se sont installés dans le Bâtiment 4 et ont investi du temps dans la gestion collective et l’aménagement du bâtiment. La présence suffisante de personnes sur place a permis d’organiser des événements communs, de partager une cuisine collective et de favoriser les échanges.

Au total, le Bâtiment 4 presque n’a pas eu besoin de budget pour ses projets, tant que suffisamment de groupes actifs avec leurs propres ressources occupaient le bâtiment. L’espace libre et la mise en réseau des acteurs ont attiré d’autres jeunes créateurs, associations et publics. Plusieurs de ces organisations étant des expertes de l’économie circulaire et bien connectées avec des initiatives comme Foodsharing, SIVEC Recup et d’autres plateformes de seconde main, des espaces communs rénovés et aménagés ont rapidement vu le jour dans le Bâtiment 4 grâce au bénévolat, sans nécessité de financement.

L'organisation interne du Bâtiment 4

Affiche “Plenum”, Bâtiment 4, 2022

L’autogestion est le modèle sur lequel le fonctionnement du Bâtiment 4 repose. En pratique, le collectif du Bâtiment 4 s’est doté d’un ensemble de règles et de structures permettant de relever ensemble tous les défis et de faire avancer le projet. Différents cercles se réunissent régulièrement (au moins une fois par mois) : le Cercle “Gouvernance”, le Cercle “Vie du lieu” et le Cercle “Finances” sont les plus importants. Le Bâtiment 4 dispose d’une plateforme numérique interne pour les échanges directs, et un grand plénum, une assemblée générale, est organisé en principe tous les trois mois.

Le collectif du Bâtiment 4 développe divers concepts pour garantir le succès du projet. D’une part, des règles sont établies pour décider de la manière dont les espaces vacants sont alloués aux candidats potentiels, de sorte qu’ils soient effectivement utilisés. Pour les artistes qui ne font pas partie d’une association du bâtiment, un espace appelé Co-Arting-Space a été créé : des salles où des artistes individuels disposent de leur propre bureau, mais qui restent fondamentalement ouverts. Le Cercle des Finances conçoit un système de micro-financements pour soutenir, par exemple, des initiatives qui rassemblent différents groupes au sein du bâtiment.

D’autres missions, telles que la rénovation des espaces, l’apport de mobilier, la décoration des espaces communs, ainsi que la création d’une identité visuelle et d’une stratégie de communication pour le bâtiment, sont prises en charge par des membres du collectif B4, avec un soutien ponctuel de la part du Facilitateur Culturel.

Théid Johanns distribue des coups

Théid Johanns au Bâtiment 4. Source : KUK 2020

Il y a peu d’artistes à Esch aussi engagés et connus que Théid Johanns. Il est responsable des expositions CUEVA, à travers lesquelles un grand nombre d’artistes locaux redonnent temporairement vie à des bâtiments ou terrains vacants grâce à leur art. Ses projets incarnent parfaitement ce qu’Esch devrait rechercher et soutenir si les responsables de la politique culturelle étaient réellement sérieux. Pour 2022, CUEVA va encore plus loin et transforme de larges parties de la friche industrielle de Metzeschmelz en une exposition d’art.

L’engagement de Théid Johanns s’accompagne toutefois d’une frustration croissante. Récemment, il a publiquement qualifié l’ancien directeur du service culturel d’Esch de “menteur incompétent” – une affirmation qui, objectivement, pourrait être considérée comme justifiée.

Pendant l’année culturelle, il exprime publiquement ses critiques et déclare au Tageblatt notamment :

« Esch2022 devrait être ancré avec des artistes qui s’intéressent à la région. Je ne dis pas qu’ils doivent forcément être des artistes locaux. Ils peuvent venir de n’importe où, tant qu’ils traitent de la région. Mais de tels artistes sont très rares à Esch2022. Et ceux qui le sont, on leur donne des miettes. La grosse part du gâteau va aux agences événementielles. La culture est donc externalisée et achetée à l’étranger auprès de cirques itinérants spécialisés qui n’ont aucun lien avec la région. » (Tageblatt, 2022)

2021

Présentation extérieure du Bâtiment 4

“Ce tiers-lieu culturel est géré par un collectif indépendant composé des occupant.e.s permanents (Hariko, CELL, ILL, Richtung22) et basé sur l’intercoopération des associations et des publics” (Citylife, 2021) écrit la municipalité d’Esch dans sa présentation pour l’ouverture du bâtiment.

frEsch, la municipalité d’Esch et aussi Esch2022 s’attribuent à chaque occasion le Bâtiment 4. Pour Esch2022, on peut lire :

« Les valeurs fondamentales de ce projet sont la créativité, l’intercoopération et la co-création ; le désir de créer une société plus ouverte et solidaire basée sur la reconnaissance, le respect, l’accueil et la valorisation de l’Autre ; le désir d’établir une culture partagée et une ‘démocratie culturelle’ ; et, enfin, le désir de construire un monde écologique et résilient. » (Esch2022, 2021)

Mais comme les responsables ne s’intéressent qu’au contrôle de la présentation extérieure, ils s’emparent de la communication du Bâtiment 4 ainsi que de l’organisation de son ouverture prévue pour décembre 2021. Le travail du Cercle de Communication du collectif B4 est placé sous supervision incluant un droit de veto par frEsch et finalement entièrement repris par frEsch. Au lieu de l’événement portes ouvertes et petit festival prévu (budget : 7 000€), frEsch décide de marquer le coup pour l’ouverture officielle du Bâtiment 4. L’organisation est externalisée, plus de 55 000 € sont investis, et les membres du collectif Bâtiment 4 ne sont même pas invités à la réception officielle du matin. Le soir, la fête, totalement surestimée, fait un flop.

frEsch reprend la communication du Bâtiment 4

Capture d’écran batiment-4.lu, 24.02.2025

Le tout premier Cercle à tomber dès l’été 2021 fut le Cercle de Communication. frEsch voulait garder le contrôle, c’est-à-dire qu’aucune publication ne devait être diffusée sans qu’une personne de frEsch ne l’ait validée.

Dès juillet 2021, le collectif avait proposé qu’une personne du collectif construise l’intégralité de la présence web et l’identité visuelle pour que celles-ci puissent être alimentées directement par des contenus mis en ligne grâce à des identifiants individuels pour chaque association et artiste. Mais frEsch voulait fusionner la communication avec celles de la Konschthal et du Bridderhaus, engager une agence et ne pas permettre que des communications non filtrées soient faites à travers les réseaux sociaux ou le site du Bâtiment 4. Après de longs conflits, le collectif a renoncé, et chaque organisation s’est concentrée sur ses propres plateformes de communication.

Le site du Bâtiment 4, réalisé par une agence, n’a été finalisé qu’en février 2023 et n’est pas vraiment fonctionnel. Les réseaux sociaux ne sont pas actifs et l’adresse email figurant sur le site n’est surveillée par personne. Le Bâtiment 4 ne dispose donc d’aucune véritable communication.

Des facilitateurs qui compliquent tout au Bâtiment 4

Mesures de protection autour du Bâtiment 4

Les relations entre le collectif du Bâtiment 4 et les facilitateurs de frEsch deviennent de plus en plus complexes.

D’un côté, il y a le facilitateur technique, légèrement paranoïaque, qui installe alarmes, caméras de surveillance, compteurs de visiteurs, grillages, une clôture de 3 mètres de haut et de nouvelles serrures, le tout sans consultation ou même contre les décisions du collectif du Bâtiment 4. Il mène dans et autour du bâtiment sa guerre personnelle contre les jeunes qui consomment parfois du cannabis à proximité, les sans-abris qui se réfugiaient depuis toujours sur la friche, et contre les horaires d’ouverture du Bâtiment 4, avec pour objectif implicite que le Bâtiment 4 ne soit plus accessible – ce qui finit par se concrétiser fin 2024. Il est ouvertement sexiste et raciste, est totalement hermétique aux projets artistiques (les odeurs de peinture le dérangent) et transmet des captures d’écran de la plateforme de communication du Bâtiment 4 comme espion du service culturel. Après la mise en conformité du bâtiment, il n’a plus réellement de mission et, à la suite de conflits avec les autres facilitateurs, il est finalement muté au Bridderhaus – mais il continue d’être payé sur le budget du Bâtiment 4.

Le facilitateur culturel est présenté par frEsch comme une sorte de shérif, mais il est manifestement complètement dépassé par le projet. Le directeur du service culturel d’Esch exerce une pression sur lui pour qu’il contourne les décisions du collectif. Par exemple, certains espaces du bâtiment sont loués sans l’accord du collectif et même contre sa décision explicite pour des événements organisés par des entreprises privées. Il doit également collecter des informations sur les différentes organisations et les transmettre au service culturel – lui aussi transmet en permanence des captures d’écran de la plateforme numérique du Bâtiment 4 à Ralph Waltmans. Finalement, cette personne est licenciée en septembre 2022 (à juste titre) pour faute grave.

La troisième facilitatrice est la personne la plus qualifiée envoyée par frEsch au Bâtiment 4, mais elle est bien moins bien rémunérée, n’a obtenu qu’un CDD et a dû signer des clauses de confidentialité détaillées dans son contrat. Elle travaille finalement en étroite collaboration avec le collectif du Bâtiment 4 et tente de faire le lien entre le collectif et frEsch. Son contrat n’est pas renouvelé à la fin de l’année 2022.

2022

Esch est Capitale européenne de la culture

En plus du grand lancement de l’ouverture d’Esch2022 fin février 2022, une anecdote restera mémorable : les Eschois autour de Georges Mischo et Pim Knaff se sont d’abord mis en avant sur scène avant de préférer aller au restaurant plutôt que de continuer à assister au programme officiel d’Esch2022. Le plus grand buzz de l’année provient d’un article de journal britannique évoquant « the EU’s most boring Capital of Culture » (Telegraph, 2022). La Konschthal est restée fermée la plupart du temps en raison de travaux de rénovation et la Bridderhaus n’a été ouverte qu’à la fin de l’année. Mais les Black Eyed Peas (sans Fergie) ont joué devant les hauts-fourneaux de Belval et le conseil échevinal présente des BMW.

Il semble qu’il y ait eu trois capitales européennes de la culture différentes. Premièrement, les projets d’Esch2022 eux-mêmes, qui ressemblent à une publicité pour le site technologique de Belval. Deuxièmement, le programme culturel des communes du sud, qui rivalisent entre elles avec des événements de prestige importés, des fêtes populaires et des feux d’artifice. Troisièmement, le grand nombre de projets plus modestes réalisés par des groupes locaux indépendants.

“Un fil rouge à travers la terre rouge” de Maskénada, “Nightsongs” et “Biergerbühn” d’ILL, “Culture élite au lieu de hauts-fourneaux” de Richtung22, “L’arrivée de la - Jeunesse” de PassaParola, “The visit” de Lucoda, F.U.T.U.R.E. ou encore “Desire Lines” d’Ampersand Variations, ne sont que quelques-uns des 130 petits projets indépendants pour Esch2022 (Esch2022, 2021), qui démontrent le grand potentiel créatif du Luxembourg.

Un Concert improvisé de Boy George à plus de 500 000 €

Conférence de presse en mars 2022 : Pim Knaff et Georges Mischo présentent la surprise. Source : Esch.lu, 2022

L’événement dans lequel frEsch a finalement investi le plus d’argent en 2022 n’était en réalité pas du tout planifié. Cet événement n’avait rien à voir avec le plan Connexions, ni avec le programme Esch2022, et n’était pas non plus, comme annoncé, prévu dans le cadre de la Pride 2022 principalement organisée par Rosa Lëtzebuerg. Il n’avait pas été budgétisé pour 2022, mais cela n’a pas empêché frEsch d’« invoquer » plus d’un demi-million d’euros.

La répartition des coûts pour ce concert est symbolique de la manière dont travaille frEsch. Le concert lui-même a été produit par la société française « Extraa ! », également active dans le cadre des Francofolies d’Esch, pour une somme de 20 000 €. « Event System » de Strasbourg a monté une scène pour 31 830 € avec du matériel provenant de l’entreprise française MPM pour 79 621,68 €. Des techniciens de scène d’une société de Lille, « La Boite à Scènes » située près de Lille, ont été embauchés, pour lesquels plus de 40 000 € ont été payés. Un directeur technique de « Super Idee », une société française déjà impliquée dans l’ouverture de la Konschthal, a reçu 7 770 € pour superviser le concert ce soir-là. L’impact économique pour Esch se limite, globalement, à la restauration, aux nuitées d’hôtel et à un Land Rover spécialement loué. Les musiciens luxembourgeois qui ont joué en première partie ne figurent même pas dans le bilan de frEsch (à titre de comparaison, Chaild avait reçu 500 € pour sa prestation aux Francofolies 2021).

Le concert en lui-même est un échec. Boy George n’étant pas en grande forme, et les responsables ont falsifié les chiffres pour faire croire à une audience plus importante. D’abord, il a été dit qu’il y avait 5 000 personnes présentes, et dans le bilan officiel de la commune d’Esch, on mentionne même 6 000. En réalité, des photos et des vidéos documentent qu’environ 2 000 personnes étaient présentes sur la place devant la mairie à ce moment-là.

Pourquoi avoir organisé un tel concert qui, en plus, a détourné le public des événements officiels de la Pride organisés à ce moment-là ? Pour répondre à cette question, il suffit de regarder qui a fièrement présenté cette idée lors d’une conférence de presse spéciale en mars 2022 : Georges Mischo et Pim Knaff – qui ont ainsi marqué leur « grand coup » à Esch (Wort, 2022).

Pas un centime de trop pour la scène locale

ournage de film au Bâtiment 4, 2022

Que des fonds soient disponibles pour la création locale en plus des grands événements et des temples culturels est plutôt un hasard. Certains moments de l’année 2022 montrent à quel point les responsables politiques sont soudainement surprenamment avares quand il s’agit de projets locaux.

Lors des Francofolies – le plus grand festival du pays – des artistes locaux comme Francis of Delirium et MAZ, qui ont été gracieusement autorisés à jouer en première partie, n’ont reçu qu’une compensation symbolique de 1 000 € chacun. La valeur principale des Francofolies pour la scène musicale locale résiderait dans la « circulation des artistes luxembourgeois et eschois dans un nouveau réseau culturel européen et international » – mais aucun exemple concret ne peut être présenté à cet égard.

Le budget prévu par frEsch pour le Bâtiment 4 n’a jamais été atteint. Il avait été promis au début du projet environ 2,4 millions d’euros pour la période 2021-2022 ; plus tard, Pim Knaff évoqua seulement 1,5 million d’euros hors salaires pour la période 2020-2024. Mais les bilans et budgets des années concernées montrent qu’au total, seulement 800 000 € sont effectivement disponibles. Et même cette somme n’est pas réellement fournie par frEsch. Une grande partie des travaux de mise aux normes du Bâtiment 4 est financée par la Croix-Rouge (pour le HARIKO), et dans l’ensemble, frEsch emploie directement les fonds de l’Œuvre, ce qui signifie que pour le Bâtiment 4, frEsch ne débourse presque rien de sa poche.

Le volet du budget de frEsch destiné à garantir les projets locaux, à travers le cofinancement de projets Esch2022 et d’initiatives locales, représente 2,4 millions d’euros pour la période 2021-2023 selon ses budgets. Mais en analysant ces documents en détail, la désillusion est grande. Le plus grand projet dans le cadre du « cofinancement » était… le concert de Boy George, pour lequel frEsch a dépensé 513 500 €. D’autres grandes subventions ont été réservées pour un projet de la KuFa, du Musée de la Résistance, de la Bridderhaus, ainsi que pour des événements majeurs tels que « Esch Mars » et « SL’Esch », soutenant donc à nouveau des projets affiliés à la commune ou à des institutions proches de celle-ci. En ne regardant que les productions à moitié indépendantes, le montant total reste à peine supérieur à 400 000 € – c’est mieux que rien. Pour 2023, toutefois, seule une somme légèrement supérieure à 200 000 € est prévue avant que cette ligne budgétaire ne soit complètement supprimée en 2024, marquant l’arrêt total du financement des projets indépendants par frEsch.

Le CA de frEsch : peu de réunions mais beaucoup de conflits d'intérêts

Pim Knaff et Marc Baum lors de la remise des clés du Bâtiment 4. Source : esch.lu, 2020

Les grandes décisions de frEsch devraient théoriquement être prises ou au moins validées par son conseil d’administration. Pourtant, ce dernier est loin d’être opérationnel, se réunissant seulement six fois durant l’année de la Capitale européenne de la culture, et à peine quatre fois l’année suivante. Par ailleurs, il se voit systématiquement privé d’informations essentielles (budgets, bilans, contrats).

Le fait que cela passe inaperçu et que personne ne s’en plaigne pendant longtemps s’explique probablement par le désintérêt des membres du CA pour l’association qu’ils supervisent. Depuis septembre 2020, en plus des cinq membres fondateurs, le CA comprend des représentants de tous les partis politiques siégeant au conseil communal (aucune mise à jour n’a été effectuée après les élections communales de 2023) ainsi que des représentants de la scène culturelle eschoise. La grande majorité des membres du CA sont directement ou indirectement liés à Pim Knaff via des fonctions politiques, des emplois ou des projets culturels financés par le service culturel d’Esch.

La directrice du Théâtre d’Esch et le directeur du service culturel sont des employés de la Ville d’Esch et dépendent directement de Pim Knaff, tout comme deux autres fonctionnaires communaux siégeant au CA. Le directeur de la KuFa est également directement lié à la politique culturelle d’Esch. Le conseil d’administration compte encore Bruno Cavaleiro (CSV), Daliah Scholl (DP) et Mandy Ragni (Verts) issus de la coalition CSV-DP-Verts, ainsi que deux membres de la LSAP, aujourd’hui désolidarisés de leur parti d’origine – l’une d’entre elles, Joëlle Pizzaferri, est également membre de FerroForum, ce qui engendre une certaine dépendance.

Enfin, il ne reste qu’une seule personne des déi Lénk, qui ne s’intéresse pas réellement à frEsch et qui, par le biais de son appartenance à un collectif théâtral eschois, a aussi une certaine dépendance. Cette personne a été remplacée au cours de 2024 par une autre personne des déi Lénk, qui, en tant qu’employée de Rosa Lëtzebuerg (subventionné par la Ville d’Esch), n’est pas non plus totalement indépendante.

2022

Un deuxième tour de belles promesses vides

La durabilité est le grand mot clé que les responsables de la politique culturelle d’Esch brandissent face à la presse, l’opposition et la population. Le 12 octobre 2022, l’ensemble du conseil communal d’Esch adopte la prochaine version de la stratégie culturelle d’Esch : le Plan Connexions 2.

L’objectif du Plan Connexions I aurait été pleinement atteint, selon Pim Knaff lors de la séance. La preuve en est constituée de “belles images” et d’une autoévaluation réalisée par le service culturel lui-même. Le nouveau document que Pim Knaff présente est, selon ses propres mots :
“pas une stratégie culturelle, mais une feuille de route […] les centaines de missions seront d’abord définies progressivement au cours des prochains mois avec tous les acteurs culturels” (Conseil Communal d’Esch, 2022), et c’est seulement ensuite qu’une véritable stratégie culturelle se dessinerait. Cette stratégie, censée être prête pour fin 2022, n’existe toujours pas à ce jour.

Au moins, la feuille de route indique ce que le Bâtiment 4 aurait pu devenir : “En juin 2023, le Bâtiment 4 sera pérennisé : les bâtisseur‧euse‧s devront d’abord faire un point sur leur travail en 2021-2022 et sur l’orientation souhaitée du Tiers-lieu, au sein d’un projet structuré. L’étude menée par la Ville d’Esch / Esch 2022 / l’Œuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte / Université d’Avignon sur la participation dans les Tiers-lieux et qui sera rendue début 2023 devra soutenir cette réflexion. Ensuite, frEsch et la Ville soutiendront le nouveau projet du Bâtiment 4.” (Connexions 2)

Avec le Plan Connexions 2, on peut encore rêver

Surtout, ne pas poser trop de questions

Sur 9 pages, renonçant cette fois-ci entièrement à la présentation élégante du premier Plan Connexions, 4 finalités et 15 objectifs sont exposés.

  • Finalité 1 - Évaluer et pérenniser l’héritage 2017-2022
  • Finalité 2 - Gouvernance culturelle : Renforcer l’écosystème et repenser le rôle des citoyen·ne·s
  • Finalité 3 - Environnement et Culture : Contribuer à la transition écologique et sociale
  • Finalité 4 - Santé et Culture : Veiller à l’inclusion et au bien-être de tout·e·s via la culture (esch.lu, 2022)

Les thèmes et objectifs abordés semblent très éloignés des actions actuelles de Pim Knaff, Ralph Waltmans et Loïc Clairet à Esch. Le Plan Connexions 2 parle de véritable participation, d’égalité d’accès, d’inclusion sociale, de responsabilité environnementale, et d’une approche globale innovante, durable et proche des citoyen·ne·s.

L'autoévaluation conclut: Tout va super bien!

Le service culturel d’Esch évalue son propre travail

Pim Knaff explique au Wort l’état d’avancement de la première partie de la stratégie :

“sur les 18 sous-objectifs fixés en 2017 dans le Plan de développement culturel Connexions 1.0, la majorité aurait été atteinte, comme l’évaluation réalisée par l’Agenda 21 for Culture indépendante l’aurait montré” (Wort, 2022).

Pim Knaff cherche-t-il intentionnellement à induire en erreur ou ne sait-il pas ? L’évaluation dont il parle, et qui est annexée au Plan Connexions 2 (esch.lu, 2022), n’était pas du tout indépendante, mais une “auto-évaluation” réalisée par la Ville d’Esch-sur-Alzette elle-même, comme il est mentionné sur le site de Culture 21. Heureusement, personne ne semble vérifier ni poser de questions.

La rédaction du rapport pour Culture 21 a été confiée à Catherine Cullen de Lille, qui avait déjà conseillé Esch dans la candidature initiale pour le titre de Capitale européenne de la culture. La deuxième partie du rapport, élaborée par le service culturel d’Esch, “évalue” la mise en œuvre des différents objectifs, ici appelés “Défis”. Cette évaluation reste extrêmement superficielle, sans aucune mesure réelle ni exemples venant appuyer les déclarations — en réalité, c’est souvent le contraire que l’on observe.

Un exemple :

“Défi 7. En 2027, les opportunités de création se feront plus fréquentes ; la création sera clairement plus visible partout à Esch et pour tous, et elle contribuera ainsi au bien-être de tous les publics.” (p.43)

Evaluation du service culturel d’Esch :

“Atteint : La création est valorisée au sein de la ville, dans l’espace public, mais aussi dans les structures (historiques ou nouvelles), qui invitent régulièrement des artistes locaux ou internationaux ainsi que des amateurs. La création de frEsch en 2021 contribue également à faciliter le développement d’actions créatives.”

Avec une autoévaluation basée uniquement sur des formulations vagues, sans preuves ni exemples, il est naturellement facile pour l’échevin de la culture de tirer un bilan positif. Ce site tente néanmoins de documenter la réalité de la création à Esch.

2023

Le bilan de l'année culturelle

Aucune des personnes photographiées ici en 2019 n’est plus responsable en 2023. Source: Esch2022, 2019

L’année de la Capitale européenne de la culture n’est même pas tout à fait terminée qu’une bataille autour du bilan commence, dans le contexte probable des élections communales de 2023. Georges Mischo et Pim Knaff qualifient leur bilan de “très positif” (Land, 2022), tandis que l’ex-bourgmestre Vera Spautz déclare : “L’année culturelle a été vendue” (Tageblatt, 2022).

En parallèle, se pose la question de la fameuse durabilité. La directrice d’Esch2022 tente de donner une impulsion finale (Wort, 2023), appelant à intégrer de façon durable Esch2022, mais reste ignorée. Au Parlement luxembourgeois, elle évoque entre autres le risque de voir le financement des projets s’arrêter (Chd.lu, 2023 - p.4).

Selon le rapport d’Esch2022, 124 projets ont été organisés dans le cadre de la Capitale européenne de la culture dans le Bâtiment 4, dont 85% étaient des projets Esch2022 (p.46). Pour ces projets, rien n’est prévu après 2022. Le ministère de la Culture considère que la responsabilité pour la durabilité d’Esch2022 incombe aux communes, mais la Ville d’Esch ne semble pas s’en sentir responsable (Woxx, 2023). En très peu de temps, les activités à Esch et en particulier au Bâtiment 4 s’effacent. Le potentiel se perd.

L'étude disparue sur le Bâtiment 4

Malheureusement, la grande étude sur le Bâtiment 4 a disparu

L’évaluation est le mot clé pour mesurer les succès de la politique d’Esch et entreprendre des démarches concrètes. Comme le Bâtiment 4 était considéré comme l’un des éléments les plus importants pour atteindre de nombreux objectifs d’Esch2022 ainsi que du Plan Connexions I, une étude approfondie avait été commandée à deux chercheurs de l’Université d’Avignon.

À chaque occasion, on évoquait cette étude comme garantissant que les bonnes leçons seraient tirées des expériences autour du Bâtiment 4.

L’étude est mentionnée dans la feuille de route du Plan Connexions 2 (p.9) et figure dans l’autoévaluation du service culturel d’Esch sur la réalisation du Plan Connexions:

“À l’heure actuelle, le travail d’études a généré (et va générer encore) des données inédites sur les publics eschois de la culture, qui servent de fondations à la prise de décisions ainsi qu’à l’élaboration de projets (comme celui du Bâtiment 4 par exemple).” (S.51).

Et aussi dans le rapport officielle d’Esch2022:

“En collaboration avec Esch2022, la Ville a donc mis en place ou soutenu des lieux de participation (le Bâtiment 4 à Esch, le FerroForum à Esch-Schifflange avec le concours d’Esch2022 et l’Œuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte). Puis la Ville a initié des études sur la participation et ses effets durant 2022 (étude sur les tiers-lieux avec Esch2022, étude sur les Grands Rêveurs, etc.) et aussi des journées d’étude/formation sur la participation en collaboration avec Esch2022 et à destination des porteur·se·s de projets.” (S.88)

Et encore une fois, en réponse à une question écrite de la faction LSAP au conseil communal d’Esch en novembre 2023, voici ce qu’écrit Pim Knaff :

“Certains indicateurs ont fait l’objet d’enquêtes (en cours de finalisation) par le service Culture : c’est le cas de la participation citoyenne au Bâtiment 4 (étude avec Esch 2022 / Œuvre Nationale de Secours Grande Duchesse Charlotte / Avignon Université) ou de la participation des Grands Rêveurs aux Nuits de la Culture et Francofolies (service Culture / frEsch). (S. 2)

En novembre 2023, l’étude était donc « en cours de finalisation » sur la base du fait que le nouveau concept pour le Bâtiment 4 devait être élaboré en 2023 ? Sur demande, les chercheurs de l’Université d’Avignon confirment avoir présenté l’étude au responsable culturel Pim Knaff dès mars 2023 et que le document final est disponible depuis début avril 2023 dans les archives du service culturel d’Esch. À ce jour, l’étude reste introuvable, bien qu’une série de journalistes aient également posé des questions à ce sujet entre-temps.

Les bilans disparus de frEsch pour 2022

Banderole de Richtung22 au Bâtiment 4, 2023

Jusqu’en juillet 2024, aucun véritable bilan de frEsch, des Francofolies, ou de la Nuit de la Culture pour la période 2021 et 2022 n’a été présenté. Pourtant, la manière dont le conseil d’administration de frEsch accomplit son travail est une question qui est rarement posée. Au final, plusieurs circonstances doivent se conjuguer pour que, ne serait-ce que les conseillers communaux, puissent avoir un aperçu de la manière dont l’argent communal est utilisé : un nouveau bourgmestre à Esch, les pressions liées au scandale fiscal de Pim Knaff, la pression médiatique. Après un “malentendu” (Tageblatt, 2024), les bilans finissent par être portés à la connaissance publique.

Les documents confirment plusieurs points reprochés depuis des années à frEsch. Il est notamment question de sociétés liées au directeur des Francofolies et de la Nuit de la Culture, Loïc Clairet, qui ont obtenu pratiquement tous les contrats lucratifs. Sur les 15 entreprises ayant perçu les plus grosses sommes pour la Nuit de la Culture 2022, 8 proviennent de l’extérieur de la Grande Région, dont 4 directement de Lille. En ce qui concerne les compagnies et productions culturelles, le constat est encore plus frappant : sur les 7 prestations les mieux rémunérées, 6 viennent de l’extérieur de la Grande Région, dont 3 de Lille. Les techniciens de scène pour quasiment tous les événements viennent de Lille et sont fournis par une entreprise appelée “La boite de scène”. Même l’entreprise de Loïc Clairet et d’Emmanuel Vinchon a reçu des fonds.

Le gaspillage d’argent concernant la Bridderhaus et le Konschthal devient visible, avec 200.000 € dépensés uniquement pour le support informatique du Konschthal. ARCELOR Mittal perçoit 11.000 € par mois pour le bâtiment B5, un autre édifice en bordure de la friche. Des millions d’euros sont investis uniquement dans la communication, sans impact réel. Pour l’événement “Reesch”, dirigé par le metteur en scène du Cirque du Soleil, 800.000 € sont dépensés pour une seule journée.

Les bilans révèlent également un autre aspect : une séparation entre les ASBL frEsch, Francofolies et La Nuit de la Culture n’a jamais existé. En tant qu’organisation au budget le plus important, frEsch a embauché du personnel qui a principalement travaillé pour les grands événements. Il n’y a pas non plus de véritable distinction entre la commune d’Esch et frEsch : les services communaux (par exemple, le service d’hygiène, le CIGL, ou encore le service juridique de la ville d’Esch) sont librement mis à disposition de l’ASBL.

Révélation : La "Carte Blanche" disparus de (fr)Esch

Après 2022, il reste autant du budget création que de la durabilité

Depuis septembre 2022, diverses associations présentent leurs projets au service culturel d’Esch et à la direction de frEsch pour s’installer et poursuivre leurs activités après l’année de la capitale européenne de la culture. Richtung22 obtient une convention avec la ville d’Esch, validée par le directeur du service culturel d’Esch, Ralph Waltmans, et l’échevin de la culture Pim Knaff, calquée sur celle proposée pour le collectif ILL. Pourtant, le temps passe sans qu’aucun suivi ne soit donné, et dès octobre, les demandes restent sans réponse. Le budget, déposé en décembre 2022 pour l’année 2023, provoque un choc : aucune nouvelle convention n’est prévue pour l’une des organisations d’Esch2022, et aucune ligne budgétaire n’est dédiée à la durabilité des activités d’Esch2022.

Le directeur du service culturel se justifie : la durabilité d’Esch2022 ne sera pas assurée par la commune, mais par frEsch. Un programme spécifique d’aide aurait été mis en place. Ce programme spécifique, censé assurer la durabilité d’Esch2022, s’avère finalement être la procédure dite “Carte Blanche” de la commune d’Esch, permettant de subventionner des projets culturels à durée limitée. Cependant, cette fois-ci, les fonds ne proviennent pas de la commune, mais de frEsch. Afin de limiter les candidatures, l’existence même de la “Carte Blanche” n’est pas rendue publique. Le service culturel informe seulement certaines organisations par email.

Le calendrier est une catastrophe : les décisions sur l’attribution des “Cartes Blanches” ne sont prises qu’en mai 2023, et les nouvelles conventions parfois signées par frEsch aussi tard qu’en novembre 2023 – pour des projets censés assurer la continuité de 2022. La somme totale allouée à la procédure “Carte Blanche” est ridicule : à peine 200.000 € sont réservés par frEsch. Cela, alors que le budget global de frEsch pour 2023 s’élève à 4 millions d’euros.

2023

Le premier grand coup contre le Bâtiment 4

Dès décembre 2022, les équipes des Francofolies et de la Nuit de la Culture visitent les locaux du Bâtiment 4. À présent qu’Esch2022 est terminé, le Bâtiment 4 est censé devenir le centre d’une “Biennale”. Malheureusement, le Bâtiment 4 n’est pas encore totalement vidé.

Lors de la toute première réunion, à laquelle l’échevin de la culture Pim Knaff se rend en février 2023 pour rencontrer les associations présentes au Bâtiment 4, il annonce la fin de l’autogestion. En outre, il est incertain que le contrat avec Arcelor-Mittal pour le Bâtiment 4 sera prolongé au-delà du 31 mai. Dès lors, l’avenir du Bâtiment 4 est gelé. À cette période, le bâtiment n’a ni personnel, ni budget, ni perspective d’avenir. Richtung22 proteste publiquement contre la politique culturelle d’Esch.

frEsch pousse même plus loin : deux des groupes les plus actifs, le projet F.u.t.u.r.e. de CELL et le projet Bunker soutenu par Noc.turn, se voient brusquement expulsés. Ce sont pourtant ces deux projets qui attiraient encore le plus de monde au Bâtiment 4 et animaient la place devant le B4.

Saint Valentin 2023 : Un tournant pour le Bâtiment 4

From Pim with Love

Le collectif du Bâtiment 4 parvient enfin à organiser une réunion avec le conseil d’administration de frEsch, même si moins de la moitié des membres du CA se déplacent finalement jusqu’au Bâtiment 4. Pour les membres du collectif, la réunion est un choc.

Pim Knaff domine les échanges et insiste pour parler principalement des sans-abris qu’il faudrait tenir à l’écart du Bâtiment 4, ainsi que d’un monument et de la grande scène sur la Piazza, que CELL devrait démonter. Peu à peu, il apparaît clairement que les membres du CA de frEsch ignorent tout du fonctionnement du Bâtiment 4, des cercles qui le composent, ou des activités qui s’y déroulent depuis 2021. Les discussions atteignent des sommets d’absurdité lorsque les membres du collectif citent les descriptions officielles des projets figurant sur le site internet de frEsch lui-même pour prouver que l’idée d’autogestion du Bâtiment 4 n’a rien de nouveau. Pim Knaff maintient que jamais une telle autogestion n’a été envisagée, que le collectif du Bâtiment 4 n’a aucun droit de regard et que la commune fera ce qu’elle veut des lieux. Il déclare que le collectif B4 n’a aucun mot à dire sur les finances, l’attribution des espaces ou le recrutement du personnel.

Après de longues discussions, il est convenu que le conseil d’administration de frEsch discutera en interne de la question de la gestion et prendra des décisions à ce propos, avant qu’une nouvelle rencontre n’ait lieu. Cette rencontre n’aura jamais lieu. Un vide s’installe au Bâtiment 4 pendant que le service culturel commence à expulser certains groupes du site.

frEsch n’adresse pas non plus d’autres problèmes. Aucun remplaçant n’a été recruté pour le poste de “facilitateur culturel”, bien que celui-ci ait été publié dès novembre et qu’il y ait eu des candidatures prometteuses. Finalement, seul le “facilitateur technique” est réaffecté au B4. Aucun budget n’est alloué aux activités du B4 et, plus important encore, aucune ligne budgétaire de la commune n’est prévue pour poursuivre les projets indépendants liés à la capitale de la culture. Les groupes qui ont eu vent de la bourse, bien trop limitée, appelée “Carte Blanche” de frEsch, s’y portent candidats, mais la majorité sont laissés sans rien. Parallèlement, les comptes des réseaux sociaux (Facebook et Instagram) du Bâtiment 4 deviennent inactifs.

De moins en moins d’activités ont lieu au Bâtiment 4. Le plan Connexions tombe dans l’oubli.

Protestations, expulsions et une bannière brûlée

Banderole de Richtung22 au Bâtiment 4 : “Stop burning our banners”, mai 2023

près que toutes les tentatives de dialogue avec le service culturel pour obtenir des garanties sur l’avenir du Bâtiment 4 aient échoué, Richtung22 s’adresse au public en mai 2023. Dans un communiqué de presse, frEsch est qualifié de “boîte noire”, la durabilité post-Esch2022 est décrite comme une farce, et les déclarations de l’échevin Pim Knaff sur la politique culturelle sont dénoncées comme de simples manœuvres électorales. Des bannières sont accrochées au Bâtiment 4, et l’affaire fait grand bruit dans la presse (Tageblatt, 2023).

Trois jours seulement après cela, et donc à deux semaines de la fin de tous les contrats au Bâtiment 4, frEsch annonce avoir conclu un accord avec Arcelor Mittal jusqu’en 2029, assurant ainsi que les groupes présents au Bâtiment 4 pourraient y rester. Plus tard, il est révélé que l’avenir du Bâtiment 4 n’était en réalité jamais remis en question. Les négociations concernaient en fait les locaux pour le personnel de frEsch, Francofolies et la Nuit de la Culture au Bâtiment 5 (B5). Le Bâtiment 4 a été utilisé par frEsch comme levier de négociation et solution de secours pour loger son personnel. Par ailleurs, après des mois d’attente, il est enfin annoncé qui bénéficierait d’une “carte blanche” de frEsch. Le plus gros budget est attribué au projet proposé par Richtung22. Au lieu d’admettre que le budget prévu était insuffisant (200 000€ pour potentiellement 40 groupes cofinancés par frEsch en 2022), Ralph Waltmans, directeur du service culturel, propose de redistribuer 70 000€ du budget du Bâtiment 4, restés inutilisés (puisque le Cercle de Finance du B4 avait été dissous par frEsch).

Parallèlement, la situation au Bâtiment 4 s’exacerbe : l’équipe de CELL est informée à la dernière minute que ses locaux seront réservés pour d’autres artistes dès le 1er juin. Quelques jours plus tard, le projet Bunker, qui avait prévu un grand événement ce week-end-là au Bâtiment 4, est expulsé. Dans une longue déclaration, noc.turn commente ces récentes évolutions et écrit : “Nous aurions du mal à croire que cela ne serait qu’un cauchemar si cette action ne s’inscrivait pas si parfaitement dans de nombreuses autres histoires du Bâtiment 4”. Ralph Waltmans tente de minimiser la situation dans la presse (Woxx, 2023), tandis que Pim Knaff disparaît de la scène. Dans la nuit, le Facilitateur Technique se donne accès aux bureaux de Richtung22, coupe les bannières et les brûle dans la cour. Il reste incertain si c’était son initiative personnelle, mais il présente ses excuses par mail au CA de frEsch.

Les élections communales de 2023

Banderole de Richtung22 au Bâtiment 4 : “Ceci n’est pas une pub électorale, Pim !”, mai 2023

L’escalade de la situation autour du Bâtiment 4 juste avant les élections n’était pas prévue par Pim Knaff, échevin de la culture. Avant les élections, lui et le bourgmestre Mischo souhaitaient présenter la culture comme une grande fête : avec des discours glorifiant l’année de la capitale européenne de la culture, l’annonce d’une “biennale” pour 2024, un festival Francofolies encore plus grand prévu pour le week-end électoral, ainsi que l’installation, durant ce même week-end, d’une vague de surf au cœur de la ville (Summer in the City) (coût de l’installation : 120 000€ pour 3 semaines, Tageblatt.lu, 2023)).

Lors d’un événement électoral des Verts à Esch, auquel participe également la ministre de la Culture Sam Tanson, la question du Bâtiment 4 est abordée. Les Verts, jusqu’alors membres de la coalition CSV-DP, se positionnent comme défenseurs du Bâtiment 4 et de l’autogestion du projet. Le candidat Meris Sehovic assure qu’il exigera de chaque partenaire de coalition potentiel qu’il s’engage, via un “wording” précis, à garantir le maintien du Bâtiment 4 comme Tiers-Lieu. Dans leur programme, les Verts déclarent : “Nous nous engageons à maintenir l’utilisation du Bâtiment 4 à des fins culturelles et à préserver l’autogestion par les acteurs culturels présents”.

Bien que le LSAP remporte les élections, il reste possible, sur le plan mathématique, de reformer une coalition CSV-DP-Verts, empêchant ainsi l’opposition de prendre le pouvoir (Land, 2023). Mais comme souvent avec les promesses faites avant les élections, rien n’est plus mentionné au sujet du Bâtiment 4 après les élections. Dans l’accord de coalition, un engagement est pris envers le plan Connexions, mais le Bâtiment 4 n’est même pas mentionné.

2023

La politique culturelle après les élections communales

Après les élections, il devient évident que tout peut continuer comme avant. Loïc Clairet, nommé directeur général de frEsch, présente le programme de la Biennale d’Esch 2024. Cela se comprend : à Mons, où Loïc Clairet avait travaillé précédemment, une biennale avait également été vue comme la solution miracle après l’année de capitale culturelle.

Cependant, avec l’attribution finale des locaux du B5, l’ancienne université d’Arcelor-Mittal, l’intérêt pour le Bâtiment 4 retombe soudainement. De nombreuses salles du Bâtiment 4 restent vides. Une réunion du CA de frEsch en juin, censée discuter de l’avenir du Bâtiment 4, est reportée à une date indéterminée. Dans le vide laissé au Bâtiment 4, un membre du Bunker-Collectif venant récupérer des affaires subit même une agression physique de la part du Facilitateur Technique.

Ce n’est qu’en octobre 2023 que l’opposition à Esch commence à réagir, avec une série importante de questions posées par le LSAP à Pim Knaff au conseil communal. Cela annonce que la politique culturelle, jusque-là marquée par une unanimité relative garantissant calme et stabilité au sein du conseil municipal, deviendra désormais un sujet central de controverses politiques.

Les trois vies et le réseau de Loïc Clairet

Loïc Clairet peut tout faire. En même temps. Partout.

Loïc Clairet, à l’image de son mentor Emmanuel Vinchon, est un homme extrêmement occupé. Les deux se rencontrent probablement à Lille, où Loïc Clairet étudie et Emmanuel Vinchon enseigne. Lorsque Marseille-Provence devient capitale culturelle en 2013, Loïc Clairet y participe pour la première fois, avant de rejoindre peu après l’équipe de Mons 2015, où il deviendra directeur culturel de la Fondation Mons 2025. Cependant, il reste à ce poste seulement un an avant d’être appelé à Esch par Emmanuel Vinchon.

En 2022, en plus de ses fonctions de directeur des Francofolies et de la Nuit de la Culture, il est également président de l’association des festivals Francofolies, voyageant à travers le monde durant l’année capitale culturelle. Sa véritable passion semble résider dans l’enseignement : depuis 2016, il donne des cours à l’Université Lille 3 à Dunkerque. Dès le départ, son activité universitaire se chevauche avec son travail à Esch. Il dispense un nombre variable de cours, et pour l’année universitaire 2023/2024, où il lance la Biennale en tant que directeur de frEsch, il dispense pas moins de sept cours différents à Dunkerque et n’est en principe jamais présent à Esch ni les lundis ni les vendredis.

Que personne dans l’équipe de Loïc Clairet ne se plaigne s’explique par le fait qu’il s’entoure principalement d’anciens collègues. Le Directeur Technique Olivier Payen, également présent à Mons 2015, en fait partie, tout comme Philippe Dethier, responsable de la production chez frEsch, et Sarah Celeapcä, responsable de la communication après avoir travaillé à la Fondation Mons 2025. Ce qui unit au moins les hommes : en plus de leurs emplois à Esch, ils gèrent également des entreprises qui reçoivent des contrats à Esch. Mais ce n’est pas tout : pour compléter son équipe, Loïc Clairet recrute également ses anciens étudiants de Lille : en 2022, trois anciens étudiants de Lille travaillent directement sous la direction de Loïc Clairet à Esch.

Pour couronner le tout, Loïc Clairet a évidemment une stratégie de sortie bien prête. En tant que consultant culturel, il est continuellement impliqué dans d’autres projets, tels que la candidature infructueuse de Reims 2028 ou encore le “Team Namur 2030”.

Le budget culturel d'Esch pour l'avenir

frEsch fait démonter les structures de CELL sur la Piazza devant le Bâtiment 4

La ligne budgétaire dédiée à Esch2022 disparaît immédiatement après l’année de la Capitale européenne de la culture du budget de la ville d’Esch. Pourtant, une image claire de cette nouvelle réalité émerge déjà. Les Nuits de la Culture et les Francofolies fusionnent désormais avec frEsch. La Bridderhaus et la Konschthal sont transférées sous la responsabilité communale afin d’y obtenir davantage de budget : elles s’inscrivent dans les budgets pour 2024 et 2025 à un peu plus de 3,6 millions d’euros. La structure et les missions de frEsch ont donc été complètement transformées, mais, de toute façon, personne au sein de la commune ne sait ce qui se passe réellement au sein de frEsch.

La subvention pour frEsch reste élevée, même sans la Konschthal et la Bridderhaus (2024 : 4,5 millions d’euros), car les festivals Francofolies, Nuits de la Culture et aussi la Biennale y sont désormais regroupés. Le projet Elektron, censé porter l’héritage artistique d’Esch2022 sous la direction artistique de Françoise Poos, est également placé sous la responsabilité de frEsch, mais considérablement réduit. La Carte Blanche de frEsch, encore annoncée en 2023 comme une grande initiative permettant de maintenir au moins une partie des projets indépendants de 2022, est supprimée entièrement en 2024.

En 2023, la ville d’Esch octroie une seule subvention supplémentaire, soit 117 000 euros à la S. à r. l. LOA (Luxembourg Open Air), une fois de plus pour un festival sans véritable impact sur la scène artistique locale. Plus tard en 2023, une convention est signée avec Rosa Lëtzebuerg, chargée de continuer à organiser le Pride Festival à Esch.

Le catalogue de questions de la LSAP

Cela suffit pour calmer le LSAP

Les six conseillers municipaux du LSAP déposent le 2 octobre 2023 leurs questions écrites à Pim Knaff. Elles concernent le bilan d’Esch2022 et une série de questions en suspens sur frEsch, les festivals et les institutions culturelles. Fondamentalement, le LSAP soulève de nombreux points pertinents, notamment pourquoi les institutions culturelles locales ne sont plus réellement impliquées dans les Nuits de la Culture, dans quelle mesure les services communaux sont associés au travail de frEsch, et si la Bridderhaus et le Bâtiment 4 fonctionnent réellement. La réponse paraît le 8 novembre.

L’argumentaire dans les réponses suit la ligne que Pim Knaff, Ralph Waltmans et Loïc Clairet tiennent depuis des années. Et comme de nombreuses questions sont formulées de manière très vague, les responsables culturels de la ville d’Esch ont la tâche facile. Les questions les plus précises ne reçoivent tout simplement aucune réponse, et de fausses informations sont délibérément diffusées.

Extraits du « bullshit bingo» :

  • Un engagement pour le plan Connexions est prétendu, mais jamais soutenu par des mesures concrètes, par exemple :

    “Pour les Francofolies, les Nuits de la Culture et les nouvelles infrastructures, les indicateurs dépendent des objectifs de chaque institution. Ils sont qualitatifs (participation citoyenne, satisfaction…) ou quantitatifs (fréquentation…). Ils sont souvent fixés en relation avec les objectifs de la stratégie culturelle.” (p. 2)

  • Des évaluations et des études sont mentionnées, mais elles ne sont malheureusement pas encore finalisées :

    “Certains indicateurs ont fait l’objet d’enquêtes (en cours de finalisation) par le service Culture : c’est le cas de la participation citoyenne au Bâtiment 4 (étude avec Esch 2022 / Œuvre Nationale de Secours Grande Duchesse Charlotte / Avignon Université) ou de la participation des Grands Rêveurs aux Nuits de la Culture et Francofolies (service Culture / frEsch).” (p. 2)

  • Des études alternatives sont promises alors qu’il n’a jamais été question de les réaliser (p. 3).
  • De nombreuses annonces et promesses creuses pour l’avenir : sur des questions plus précises, Pim Knaff affirme que tout est encore nouveau et que les initiatives nécessaires sont actuellement mises en place. Par exemple, l’absence d’utilisation de la Bridderhaus et le manque de possibilités pour soumettre des candidatures de résidence sont justifiés par cette annonce :

    “Les artistes qui désirent soumettre une candidature pour une résidence au Bridderhaus pourront le faire dans le cadre d’un appel public et international qui sera lancé en 2024.” (p. 15) Un tel appel public n’avait toujours pas été lancé début 2025 et, en février 2025, seules deux résidences sont occupées à la Bridderhaus.

Sur d’autres questions, aucune réponse n’est donnée, par exemple :

Question du LSAP : “Quels accords ont été conclus avec des partenaires ou des prestataires de services pour garantir la réussite des Francofolies ? Pouvez-vous également nous informer sur le coût de ces accords ?”
Réponse de Pim Knaff : “La réponse est la même que pour les Nuits de la Culture, un détail exhaustif est impossible et illisible et la non prise en compte des retombées économiques est réductrice de l’implantation et du bien-fondé du projet sur son territoire. […]” (p. 18)

À propos du Bâtiment 4, seules des inventions et de fausses promesses sont relevées dans les réponses. Par exemple, Pim Knaff écrit :

“L’activité artistique, culturelle et socioculturelle sur le site ne cesse de croître depuis l’ouverture du Bâtiment 4 en décembre 2021. Si en 2021, le nombre de porteurs de projets ayant signé une convention était de 8, il est passé à 34 en 2022 pour être au nombre de 62 en octobre 2023.”

Au même moment, en novembre 2023, frEsch envoie un courriel à toutes les associations et artistes présents au Bâtiment 4, y compris une liste de ceux qui y sont actuellement actifs. Ils sont à peine 22. Toutes les autres réponses sont également erronées : les informations budgétaires sur le Bâtiment 4 sont inexactes, celles sur le personnel sont également fausses (tout comme la promesse d’embaucher une nouvelle personne en 2024), et un mode de gouvernance et de fonctionnement du Bâtiment 4 est simplement inventé.

2024

Temps troublés à Esch

Pendant des mois, rien ne se passe au Bâtiment 4, puis, sans avertissement, trois artistes et le collectif artistique Richtung22 se voient résilier leurs espaces. Richtung22 tente d’abord de contacter frEsch, mais ne reçoit aucune réponse) et rend ensuite l’affaire publique. La presse fait état de l’affaire et Pim Knaff décide de ne pas expulser le collectif artistique. Lors d’une réunion du conseil municipal (à partir de 1:06:00), il promet une médiation entre frEsch et Richtung22.

Deux semaines plus tard, une autre affaire devient le centre de débats publics : Reporter révèle que l’échevin de la culture, Pim Knaff, a été condamné pour fraude fiscale aggravée. Le scandale domine les reportages sur Esch pendant des semaines. Étonnamment, cela n’a aucune conséquence pour Pim Knaff. Les partenaires de la coalition craignent une perte de pouvoir, et l’opposition reste globalement passive.

Entre-temps, le programme festif de Loïc Clairet se poursuit sans changement selon le même schéma que les années précédentes. David Guetta se produit aux Francofolies 2024. Pour l’ouverture somptueuse de la Biennale (Chronicle, 2024), des sommes colossales sont destinées à des compagnies extérieures à la Grande Région. La contribution des artistes locaux se limite à quelques danseurs et à la musique d’ambiance de l’aftershow.

À partir de novembre 2023, le Bâtiment 4 revient sur l'agenda de frEsch

Peinture dans la cave du Bâtiment 4, 2023

Les questions du LSAP et les critiques, qui sont désormais de plus en plus souvent exprimées au niveau du conseil municipal, ont au moins un effet marginal. Après des mois d’inactivité, une réunion a lieu en novembre 2023 au Bâtiment 4 entre les groupes et artistes encore présents.

Le cadre de cette réunion est pour le moins particulier. Au lieu d’une grande assemblée, le CA de frEsch (à peine la moitié des membres étant présents) invite les groupes et artistes du Bâtiment 4 successivement en petits comités. Ils sont interrogés sur leurs besoins et attentes envers le Bâtiment 4. La principale conclusion au sein de frEsch après cette réunion : l’autogestion (qui avait déjà été mise de côté par frEsch neuf mois plus tôt) ne fonctionne pas. frEsch promet aux occupants du Bâtiment 4 qu’une réunion commune sera organisée sous peu, lors de laquelle un concept pour le Bâtiment 4 sera présenté. Une telle réunion n’a pas eu lieu à ce jour (février 2025). Loïc Clairet est chargé de l’élaboration du concept.

Des évolutions se font cependant sentir sur d’autres points. Ainsi, pour les “Cartes Blanches” de 2023, soumises en février et décidées en mai, les contrats sont finalement signés en novembre 2023. Une personne, auparavant responsable de la comptabilité chez frEsch mais qui n’a pas été transférée à la Konschthal ni à la Bridderhaus, est désormais désignée pour gérer le Bâtiment 4 de manière transitoire, permettant ainsi qu’il y ait à nouveau une personne de contact après un an d’absence.

Pourquoi Richtung22 a été expulsé

Deuxième série de banderoles pour la façade du Bâtiment 4 : “Francofolies : 1,6 Mio. - Artistes ici : Expulsion”

Aucun motif officiel n’a été donné pour l’expulsion de Richtung22 jusqu’à aujourd’hui par frEsch. Il semble évident que des ressentiments politiques et des ego personnels jouent un rôle, mais théoriquement, il devrait y avoir un motif officiel. Le contact direct entre frEsch et le collectif artistique se résume cependant à 3 lettres brèves qui transmettent essentiellement le message suivant : Vous êtes expulsés. Certains membres du conseil d’administration de frEsch ont été informés par Richtung22 des raisons transmises par Loïc Clairet (qui n’avait jusqu’à ce moment rien à voir avec le Bâtiment 4 et qui n’a jamais eu de discussions directes avec Richtung22) : Richtung22 ne se serait pas conformé au “règlement intérieur”, d’autres groupes du Bâtiment 4 se seraient plaints de Richtung22, et Richtung22 aurait changé des serrures. Dans un autre mail adressé au conseil d’administration de frEsch, Richtung22 clarifie qu’il n’existait pas de règlement intérieur car le document planifié par le collectif du Bâtiment 4 n’a jamais été finalisé, étant bloqué par frEsch. Les serrures ont été changées et d’autres travaux de rénovation ont été effectués parce que frEsch n’a pas été capable, pendant plusieurs mois, d’effectuer même les travaux d’entretien de base – frEsch en a été informé. Concernant les accusations selon lesquelles d’autres groupes se seraient opposés à Richtung22, ces groupes eux-mêmes ont répondu dans une lettre conjointe au CA de frEsch, affirmant que cela n’était pas le cas. Ils écrivent, entre autres : “De notre point de vue, les différents membres de Richtung22 ont beaucoup contribué à créer et maintenir une coexistence dans le Bâtiment 4 avec tous les autres occupants.”

Face à la pression publique continue sur frEsch au mois de mai, un communiqué de presse a finalement été envoyé. Ici, frEsch énumère des raisons, mais celles-ci sont maintenant très différentes de celles mentionnées en interne auparavant : “Convaincu que le maintien d’une atmosphère vivante, créative et innovante au sein du Bâtiment4 nécessite une évaluation régulière de la pertinence d’une reconduction éventuelle des contrats de mise à disposition de tous les occupants du Bâtiment4, une analyse a été réalisée en mars 2024 en prenant en compte les critères suivants :

  • Fréquentation et utilisation régulières des espaces mis à disposition,
  • Contribution à la vie du tiers-lieu culturel,
  • Participation à la vie culturelle eschoise,
  • Participation à la transformation de l’image de la ville, - Respect de la sécurité au B4,
  • Propreté et rangement de la cuisine après utilisation,
  • Propreté et rangement des salles communes après utilisation”

Face à ces accusations en partie absurdes, Richtung22 répond au CA de frEsch dans (Réponse de Richtung22) et demande encore une fois une conversation directe. Cependant, à ce moment-là, d’autres raisons commencent à transparaître, qui semblent effectivement avoir été décisives. En effet, au groupe “Arts libre”, dont les ateliers doivent être rénovés, Pim Knaff et Daliah Scholl ont proposé une alternative : les locaux de Richtung22 semblent idéaux, car ils disposent d’une arrivée d’eau, de suffisamment d’espace et d’un accès à de l’électricité haute tension. “Art libre” a reçu la promesse de pouvoir emménager le 1er juin 2024. Bien que ce groupe ne se réunisse que deux fois par semaine, il entretient de bons contacts avec la DP locale. La théorie selon laquelle les locaux du Bâtiment 4 seront simplement redistribués sous la main du responsable culturel ou même du directeur du service culturel à partir de 2023, à des personnes ne correspondant pas aux critères originaux – ni même aux critères récemment inventés par frEsch pour expulser Richtung22, comme celui de l’utilisation régulière du Bâtiment 4 – semble donc se confirmer.

Fun Facts de la Biennale

Avec le Bâtiment 4, frEsch vise le grand public

L’architecture est le thème de la première Biennale à Esch, bien que de nombreux événements n’aient rien à voir avec l’architecture. Entre-temps, la presse se moque ouvertement de ce que frEsch présente (Wort, 2024).

Le premier jour de l’ouverture est annulé à cause du mauvais temps, et le deuxième jour, il y a peu de monde. Symboliquement, l’ouverture a eu lieu le même jour que le Culture Forest Festival, le seul festival à Esch qui met effectivement en avant la scène musicale locale. Et bien sûr, il n’est soutenu financièrement ni par frEsch ni par le service culturel d’Esch.

L’idée d’organiser une biennale n’a pas été apportée par Loïc Clairet de Mons, mais le directeur très occupé de frEsch utilise aussi, dans les moindres détails, les mêmes concepts d’événements. Par exemple, l’idée de “LËT’Z DANCE” ressemble fortement au concept de “Tout Mons Danse”, sauf que le contenu local ici est plagié, et la chercheuse concernée, Laura Steil, se plaint également (Tageblatt, 2024).

2025

Teflon-frEsch

Avec son scandale fiscal, Pim Knaff est désormais sous surveillance. Après des années d’opacité, il est désormais contraint de fournir des bilans financiers détaillés de frEsch aux partis d’opposition (Wort, 2024). Des conflits d’intérêts flagrants deviennent visibles. Le Tageblatt dévoile plusieurs histoires autour de frEsch, dont les nombreux emplois secondaires du directeur de frEsch, Loïc Clairet. Mais là aussi, jusqu’à aujourd’hui : aucune conséquence.

Depuis que frEsch tente d’expulser Richtung22 du Bâtiment 4, le chef du service culturel d’Esch, Ralph Waltmans, est en congé maladie. C’était lui qui, peu avant, avait orchestré l’expulsion du collectif. Une médiation a été lancée par frEsch en octobre 2024, mais à ce jour, le CA de frEsch refuse toujours une discussion directe avec Richtung22. L’ex-responsable Ralph Waltmans a, entre-temps, été transféré au Ministère de l’Éducation comme chargé de l’inclusion et de l’innovation.

L’avenir du Bâtiment 4 reste incertain. Le bâtiment reste ainsi un symbole d’une politique culturelle qui n’ose pas croire au potentiel de sa propre ville. Au lieu de se concentrer sur sa propre stratégie, de soutenir les artistes locaux et de favoriser la collaboration entre ses institutions culturelles, des millions sont injectés dans des recettes génériques proposées par des consultants culturels à but lucratif.